they are red, terrible & red. (ashley)

Pourquoi Ashley était-elle entrée, déjà ? Parce qu’il fallait absolument qu’elle réponde à cette question. La simple vue de cet endroit risquait de la rendre malade, ou alors de déclencher une violente crise d’épilepsie, ce qui était tout de même à éviter, pas vrai ?

Les boîtes de nuit, ce n’était pas trop son truc, à vrai dire. Les fêtes, en général, elle détestait. Le bruit était insoutenable, la musique de mauvais goût, et toute pudeur semblait fondre comme neige au soleil. Ces filles à peine vêtues qui se frottaient contre l’intimité des hommes, qui semblaient au comble du bonheur, aucun des deux camps ne semblant se préoccuper de toutes les règles basiques de la société. Les tempes d’Ashley lui pulsaient déjà dans la tête. Qu’est-ce qui lui avait pris ?

Il fallait l’avouer. Une vessie pleine à craquer n’était jamais mère de bons conseils. Or, les toilettes les plus proches étaient sois réservées aux clients, alors que la rouquine n’avait pas un sous avec elle... sois dans cet endroit qu’elle redoutait depuis toute petite. Bon. La sorcière n’avait légalement pas le droit d’entrer... Mais les videurs étaient devenus moins sévères. La haute présence de vampires et autres créatures pouvant transcender la vieillesse avait rendu les cartes d’identités un peu inutiles. Impossible de déterminer l’âge réel de quelqu’un en le regardant... Du coup, elle n’avait eu qu’à se glisser parmi un groupe pour se faufiler à l’intérieur de la bâtisse. Autant dire que le son l’avait saisie.

On voyait bien, pourtant, que la gamine n’avait rien à faire là. Un air véritablement perdu, des vêtements trop grands, pas du tout sexys, aucun maquillage, les joues encore rouges de la fraîcheur nocturne extérieure et une envie non-dissimulée de ficher le camp... C’était une situation à se poser des questions sur l’efficacité de la sécurité.  

Ashley était demeurée un moment immobile, saisie par l’ambiance de l’endroit. Une musique bien trop forte qui lui fila rapidement un mal de tête, un jeu de lumière étourdissant et angoissante, qui coupait les mouvements et donnait une incroyable impression de lenteur et puis... et puis les clients, tous moins vêtus les uns que les autres, se frottant sans gêne en oubliant toutes les règles de base de la pudeur. Pas que la rouquine était spécialement sainte-ni-touche – quoique si, un peu, mais pas trop – mais elle avait du mal à croire que l’on pouvait réellement mettre de côté tout son honneur de la sorte. Son regard azuré s’habitua peu à peu, alors qu’elle contenait ce qui semblait être une nausée. Elle devait trouver les toilettes, tout du moins avant que quelqu’un ne vienne l’aborder et qu’elle soit trop mal-à-l’aise pour filer.

Lorsque la sorcière aperçut enfin le panneau indiquant l’endroit salvateur, elle ne réfléchit plus et y accourut. La salvation, enfin ! ... Mais non. Parce que tout ceux ayant sortit au moins une fois dans la vie, et possédant les attributs féminins, connaissent le terrible fléau de la salle de bain : les files. En l’occurrence, celle-ci était assez longue. Aucun moyen de déterminer qui attendait une copine et qui attendait une cabine. Cela provoquait un agacement plutôt puissant chez notre jeune femme, d’autant plus qu’elles semblaient bien prendre leur temps, les vilaines !

La demoiselle entendit quelques petits gémissements venir de l’unes des cabines. Sous la gêne occasionnée, la majorité des occupantes décidèrent de filer. La jeune femme aurait voulu faire de même, mais voilà : elle n’arrivait plus à se contenir. Elle fila donc rapidement aux toilettes, et libéra enfin sa vessie de toute cette pression dans un profond soupire démontrant bien l’état dans lequel elle s’était trouvée quelques instants plus tôt. Y avait-il une meilleure sensation au monde que celle-ci ? Elle se permettait de douter.

Lorsqu’Ashley sortit enfin, allant se laver, les mains, elle fut surprise de voir un homme, torse nu et le pantalon étrangement déformé, sortir de la cabine voisine à la sienne. Elle l’aurait volontiers apostrophé, si ce n’avait pas été de la marque de morsure bien apparente sur sa peau. Nerveusement, la rouquine passa une main sur son cou, couvert d’un petit foulard se voulant protecteur. Elle sentit toutes couleurs quitter son visage et dut s’appuyer contre le comptoir pour ne pas s’écrouler au sol.

Sa respiration s’accéléra. Le souvenir était encore bien trop vif. Il datait d’il y avait moins d’une semaine. Elle était sortie, comme elle le faisait souvent, vêtue de sa cape noire, se prenant comme d’habitude pour l’héroïne de la veuve et de l’orphelin. Sauf que dans le cas qui s’était présenté, ceux-ci se faisaient attaqués par un vampire pris d’une véritable crise sanguinaire. Comme la parfaite petite rouquine au cœur d’or et à l’esprit un brin trop impulsif, la sorcière avait dressé un bouclier lumineux entre les proies et le prédateur, espérant permettre à celui-ci de reprendre ses esprits. Bien évidement, tout le monde peut présumé que cela ne s’était pas exactement terminé comme ça, pas vrai ? Quand un être se dresse entre un chasseur et sa nourriture, il devient lui-même la nourriture dont-il l’a privé.

Cette sensation de douleur cuisante, de vie qui semblait quitter son corps, ne s’était pas effacée de sa mémoire. Ashley avait vraiment crû laisser sa peau entre les bras de ce comte Dracula moderne. Pourtant, pour une raison qu’elle ignorait –et qu’elle ne s’était pas donnée la peine de demander – il l’avait relâché, et la jeune femme avait put détaler comme un lapin sans demander son reste. Son don s’était rapidement occupé de refermer la plaie et de régénérer le sang perdu, il avait même déjà commencé pendant l’attaque, mais elle avait gardé le foulard. Cela lui offrait un sentiment de protection, comme si le mince tissu pouvait la protéger des crocs meurtriers.

Son souffle s’était accéléré alors qu’elle observait la rousse sortir à son tour de la cabine. Les autres filles avaient fuis, sans se poser de questions. Alors pourquoi ne parvenait-elle pas à bouger ? Elle semblait clouer sur place, incapable de bouger. Ses vêtements trop grands et le mince tissus autour de sa gorge lui semblaient soudainement ridicules, incapable de la protéger, et Ashley se sentit aussi vulnérable qu’un nouveau-né dans son appareil d’Adam. La demoiselle ne parvenait simplement pas à réagir, ressemblant étrangement à un poisson rouge que l’on aurait sortit de son bocal. Puis, la vampire lui adressa simplement la parole, vraisemblablement heureuse de rencontrer une autre vraie rousse. Un argument suffisant pour ne pas la dévorer ?

La vampire sortit ensuite une cigarette en s’asseyant sur le comptoir trempé. Elle ne semblait pas agressive. Était-ce un jeu ? Avait-elle hypnotisée le jeune homme pour qu’il se laisse ainsi mordre ? Malgré sa crainte de frustrer l’éternelle, Ashley refusa d’un petit mouvement de tête la clope qu’elle lui tendait. Contrairement à sa consoeur rousse, le tabac pouvait la tuer, et sincèrement elle ne voulait pas commencer ça. Une vraie drogue. La sorcière gratta nerveusement sa peau, par-dessus le foulard, observant la détentrice de crocs. Comment prévoir les actions d’un vampire ? N’étaient-ils pas dépeints comme des être semant le chaos ?

- Vous... Vous comptez me faire du mal..? finit-elle par souffler, reculant sagement d’un pas pour lui laisser un espace suffisant pour être confortable. Ashley n’avait pas l’habitude d’avoir peur, et encore moins de l’inconnu. Peut-être était-ce simplement parce qu’elle ne s’était toujours pas remise du choc de cette attaque, allez savoir. Elle se massa le visage d’une main, prenant soudainement conscience que ses paroles pouvaient s’avérer blessantes. Difficile de réparer une bourde comme ça, pas vrai ? S-sans vouloir vous offenser, bien sûr... ajouta-t-elle donc d’une petite voix un brin craintive.

Une gamine. Voilà. Elle ressemblait à une véritable gamine prise au piège.