Here Comes Trouble || Pv Sasha

Ses espoirs? Envolés. Son avenir était déjà tout tracé. Mais elle ne le savait pas encore. Ses rêves? Brisés. Son destin était déjà tout dessiné.  Mais elle ne pouvait pas encore le savoir. Ses lèvres bougeaient. Sa voix se baladait à travers la pièce. Des mots semblaient sortir de sa bouche colorée à forte dose de rose pastel. Pourtant, je n'entendais rien. Ses aspirations. Ses envies. Je n'en avais que faire. Les humains... ah oui... Les humains. Si... Insignifiants. Se rendaient-ils compte qu'ils n'étaient jamais plus que des asticots à notre merci? Non. Bien entendu. Ils avaient un ego aussi démesuré que le dressing de Danae. Ses bras s'agitaient dans les airs, accentuant ses dires par des gestes aussi ridicules que la couleur orangé sur ses ongles. Par moment, je feignais un intérêt quelconque en hochant la tête. Elle aurait pu demander mon héritage que j'aurais continué à acquiescer sans broncher. Cette pauvre humaine allait mourir, de toute façon. Je pouvais bien lui accorder un dernier plaisir en prétextant être l'oreille attentive à son chagrin. Pourtant, ce manège commençait sérieusement à m'irriter. Je pouvais sentir l'odeur du sang chaud qui coulait sous sa peau. Je pouvais sentir son arôme naturel, bien enfoui sous la tonne de parfum à la rose qu'elle avait mit. L'artère de son cou dégagé me faisait sournoisement de l'oeil. J'avais envie d'enfouir mes crocs dans sa chair tendre. J'avais envie de sentir son liquide carmin emplir ma bouche et réveiller ainsi mes papilles gustatives.

Nous, les vampires, nous sommes éternels. Mais nous sommes également d'éternels esclaves. Esclaves du sang. Nous sommes mort mais nous nous raccrochons toujours plus à la vie. Nous sommes à l'entre deux et si on prenait vraiment le temps d'y réfléchir, on se rendrait comptes que nous sommes également des parasites. Nous parasitions les vivants. Nous sommes de vilaines tics qui nous nous approprions ce qui ne nous appartiens pas. Et tout en constatant cela, je ne pouvais m'empêcher de considérer mon interlocutrice comme une simple poche de sang. Elle était le gibier. J'étais le prédateur. Elle était mon instrument. Mon objet. Ma chose.

- Je comprend tout à fait, Brittany, affirmais-je avec conviction. Je n'avais aucune idée du débat qu'elle avait lancé. Ni pourquoi elle semblait si révoltée. Toutefois, mon appuie sur sa vision des choses l'apaisa. Et alors qu'elle cessa enfin de piailler pour rien, mes sens vampiriques s'éveillèrent. Avec un plaisir que j'avais grandement du mal à dissimuler, je distinguais une présence, des bruits de pas. Un coeur qui bat et une odeur. Son odeur. Elle arrivait. Je pouvais entendre la voix de Calypso accueillir mon invitée pour la guider jusqu'à mon bureau.

L'ennuie ressenti précédemment s'envola tel une particule de poussière soufflée par le vent de l'hiver. Un vent frais revigorant et pourtant, si j'avais été humaine j'aurais senti une flamme versatile creuser mon estomac. Soudainement nerveuse, je levais mes fesses moulées de cuir pour contourner mon bureau en noyer. Mes doigts glissaient le long de cette surface lisse et méticuleusement cirée. C'était nerveux. Je voulais que tout sois parfait. Je voulais faire les choses en grand. Je voulais le meilleur pour mon invitée.

Les yeux clairs de Brittany me fixaient alors que je m'approchais d'elle. Jeune enfant. Douce enfant. Elle me regardait avec les yeux de l'insouciance. Son palpitant s'emballa quelque peu mais sans plus. Elle demeurait confiante, persuadée d'avoir trouvé en moi l'amie qu'elle avait cherché. Il suffisait parfois de peu pour contenter les humains. Surtout lorsqu'ils se sentent terriblement seul. Ils sont alors tellement vulnérable. Tellement malléable. Dans un geste tendre, ma main se posa avec délicatesse sur l'épaule de Brittany.

- Merci beaucoup, Brittany, pour le cadeau que tu nous fais ce soir.

Ses sourcils finement épilés se froncèrent. Bien entendu, elle ne comprenait pas. Comment pourrait-elle comprendre qu'elle était l'agneau du sacrifice? Comment pouvait-elle comprendre que ce soir, sa vie s’achèverait pour accomplir l'un des plus beaux dessein que l'on puisse esquisser. Et bien que mes remerciements étaient sincères, cela n'empêcha guère ma main libre de perforer sa cage thoracique. Vous avez déjà essayé de forcer l'entrée d'une entre côte? Non? Jamais. Ce n'était pas la sensation la plus agréable. Pourtant, le crac sonore qui avait retenti lugubrement tinta à mon oreille comme une douce mélodie. Ma main outrageusement en elle, Brittany n'était toujours pas morte. Non. Pas encore. Je pouvais lire au fond de ses prunelles toutes l'horreur et l'incompréhension du monde. La douleur déformait avec magnificence son visage de porcelaine trop surchargé de maquillage. Un battement. J'entendais des pas s'arrêter derrière la porte de mon bureau. Deux battements. La poignée se clenche. Trois battements. La porte s'ouvrit sur mon invitée.

Avec satisfaction, ma poigne sur ce coeur encore palpitant se resserra pour mieux l'extraire de son domicile original. Il était chaud, bouillant. N'y a-t-il rien de plus pur que le coeur d'une jeune femme humaine? Un frisson de délice dégoulina le long de ma colonne vertébrale à l'instar du sang qui s'égouttait entre mes doigts.

- Bonsoir, Sasha. C'est pour toi, fis-je en me redressant. Bras tendu vers elle, j'attendais avec une grande impatience sa réaction. Je ne voulais qu'une chose : la séduire. La rendre folle de moi et accessoirement, obtenir sa confiance. Alors j'espérais vraiment qu'elle ne jouerait pas sa difficile. On ne pouvait pas faire plus chaud. Tout droit sorti du four.