Nice to meet you... or not || Pv Elizabeth & Requiem & Phoebe

Elle était libre. Libre de ses mouvements. Libre de ses chaînes. Incapable de penser, elle dansait. Incapable de réfléchir, elle riait aux éclats. Sa voix cristalline s'élevait dans les airs. Sa voix remplie d'une joie de vivre qui lui était devenue rare. Ce soir, les choses étaient différentes. Ce soir, elle était différente. Ce soir... Elle avait beaucoup trop bu. Titubant par moment, elle essayait parfois de garder une certaine contenance... avant d'inévitablement se servir de son amie comme l'on se servirait d'un poteau. Dans les rues il n'y avait pas foule mais à elles seules, elles animaient la rue comme si il y avait toute une assemblée.

Son regard usuellement obscurs observait avec malice la brunette à ses côtés. Elizabeth. La fille qui vivait dans une boîte. Elizabeth. La vampire venue d'une autre époque. Autant de temps enfermée, sans avoir pu profiter de la vie... Absolument, c'était un comble. Tant d'année à rattraper. Tant de plaisir à s'octroyer. Besoin de décompresser. Besoin d'oublier. Quand Roxane devait se mettre la tête à l'envers, dorénavant, elle ne jurait que par Elizabeth. Duo de choc. La blonde et la brune. Cette nuit-là, le monde leur appartenait. Cette nuit-là, tout était possible. Douce euphorie. Sombre décadence.

- Et ensuite tu sais ce qu'il a osé faire? questionna la blonde, attrapant sa comparse par les épaules. Un petit rire innocent franchit ses lèvres, comme si cette histoire l'avait toujours amusée. Il m'a laissé dans une benne à ordure. A mon réveil, il faisait jour et j'ai du rester dans cette caisse puante toute la journée. Tu vois... au final... Je comprends ce que tu as ressenti ces dernières décennies, affirmait Roxane alors les traits de son visage se transformait en une moue enfantine.

Effectuant un jeu de sourcil pervers et ridicule, elle s'éloigna de la vampire. Tranquillement, elle portait une bouteille de rhum ambré à ses lèvres alors qu'elle se dirigeait sur la route. La nuit leur appartenait. La route leur appartenait. New-York leur appartenait. La tête penchée en arrière pour boire de façon plus aisée, elle dansait sur elle-même pendant que le liquide tant convoité lui brûlé la gorge pour ensuite lui tordre les boyaux. Agréable douleur tant convoité. Les souvenirs s'effacent. La peine s'envole. Il ne subsistait que l'euphorie. Redressant la tête, la vampire remarqua un couple de gens à l'autre de la rue.

- Elizabethhhh, chuchota de façon exagérée la blonde, revenant sur le trottoir. Regarde. D'un hochement, elle désigna les deux personnes qu'elle avait remarqué. Je crois qu'il est temps de chasser, tu ne crois pas?

Sans attendre de réponse, elle balança sa consommation dans la poubelle la plus proche et essuya vaguement ses mains contre son pantalon de cuir noir.

© disturbed

Nice to meet you... or not

Nos pas résonnèrent contre les pavés sombres de la ruelle tout aussi lugubre. Elle était vide de vie, seules nos deux silhouettes l'animaient. Je marchai vite, un peu trop au goût de Phoebe qui traînait les pieds. Mon envie de rentrer surpassait ses plaintes ... Je n'aimais pas cet endroit. Je n'aimais pas le monde extérieur tout court. Surtout la nuit. La nuit était hostile et mortelle, et nous étions faibles face aux démons qui l'habitaient. J'avais un mauvais pressentiment, mes dons de voyance m'avaient appris à le sentir... Quelque chose allait sortir de l'ombre, j'en étais persuadé. Pourquoi avais-je accepté de sortir ? J'aurai dû me montrer plus ferme, plus persuasif ! Mais je ne pouvais refuser les demandes de Phoebe, c'était plus fort que moi.  

"Un restaurant, c'est tout ce que je te demande ...", m'avait-elle dit. Je ne rejetais pas la faute sur elle bien évidemment car j'en avais aussi envie ... Mais un stress intense me submergeait maintenant à chaque pas. Je n'avais pas peur pour ma vie, mais pour celle de ma bien aimée. Je savais que je ne mourrais pas ce soir ... Mais Phoebe ? Il fallait que je la protège quoiqu'il arrive, il fallait que l'on rentre quoiqu'il arrive ... Car si mal lui était fait, mon monde s'écroulerait. Je tournais la tête pour la regarder, et lui adressai un sourire pour la rassurer. Il était faux, bien évidemment ... Le mensonge n'était guère ma spécialité, mais je ne pouvais faire mieux.

Ma main serra la sienne un peu plus fort, pressant le pas. Nous étions bientôt arrivé à notre foyer, notre seul et unique protection contre les bassesses de ce monde. Fous étaient ceux qui osaient s'aventurer dehors, chanceux ceux qui en sortaient indemnes ! Nous étions fous, mais chanceux ... Cela restait à voir. Des rires se firent entendre, la pression monta d'un cran dans tout mon corps. Je me figeai, arrêtant pendant quelques instants ma respiration. Je me mis devant Phoebe, par réflexe et fixai les deux silhouettes approchantes. Deux femmes ... Alcoolisées probablement. Elles s'avancèrent, bien trop rapidement et facilement au vue de leur état ... Vampires ?!?     

- Bonsoir. Seriez vous perdus par le plus grand des hasards ?

Elle empestait l'alcool ! Si c'était vraiment des vampires, leurs aînés devaient avoir honte d'elles ... Tant d'années à vouloir montrer une image d'eux effrayantes balayées par ces deux femmes à l'allure pathétique. Mes dents se serrèrent par automatisme et je lâchai sèchement mais calmement :  

- Bonsoir, non nous ne sommes pas perdus, passez votre chemin et allez désaouler ailleurs.  

A l'intérieur je bouillonnais, car contre elles, nous avions peu de chance de nous en sortir. Même si ma mort n'étais pas prévue ce soir, l'histoire pouvait être réécrite bien que cela pouvait avoir des conséquences lourdes sur le futur. Est-ce que Phoebe avait remarqué ? Elle qui en avait déjà côtoyée ? Son don pouvait nous aider mais la mettre en danger m'était inconcevable. Cela m'énervait mais nous avions qu'une chose à faire, attendre ... Attendre que le destin nous écrase ou nous épargne, s'il était miséricordieux ...

J'avais la sensation ces derniers temps que Requiem et moi nous éloignons. J'étais constamment ailleurs, par désir de m'entraîner, besoin de bosser, recherche d'événement nécessitant une chanteuse, ce genre de choses, et je commençais à me dire qu'à ce rythme, j'allais perdre ce lien qui nous unissait. On aurait dit qu'on ne faisait plus rien ensemble, et je pensais que, peut-être, une soirée en amoureux ne nous ferait pas de mal. Et moi qui déteste les restaurants, ayant toujours jugé préférable de rester chez soit bien tranquillement au lieu de dépenser des sommes faramineuses pour de la nourriture dont on n'est même pas sûr de savoir ( ni même de vouloir savoir ) comment elle a été préparée... j'avais pourtant insisté pour qu'on y aille. Ayant finalement renoncer à objecter, Requiem avait accepté et je crois pouvoir dire que la soirée c'était bien déroulée...
C'est ainsi que nous nous retrouvâmes en pleine nuit, main dans la main à déambuler dans une rue déserte, prêt à retourner chez nous. J'aimais cette moment de la journée. Lorsque tout est noir et que l'on a la sensation que le monde nous appartient. On voit les choses différemment la nuit. Tout est plus beau, la moindre lumière nous semble spéciale, comme si elle embellissait un peu plus le paysage. Mais je ne vais pas vous mentir, ce qui me plaisait le plus, c'était les risques. On ne sait jamais sur qui ou sur quoi on peut tomber. Cela m'amusait... surtout qu'en général, c'est moi qui gagnait. Toutefois aujourd'hui, je me sentais un peu tendue. Il avait suffit d'une pression un peu plus forte de la main de Requiem sur la mienne pour me signaler qu'il avait un mauvais pressentiment, et cette fois oui, je m'inquiétais un peu de ce sur quoi nous allions tomber. Mais pas pour moi. Pour lui. J'avais peur que son mauvais pressentiment n'inclue des êtres un peu plus maléfique que prévu, j'avais peur qu'il se mette devant moi pour me protéger mais se fasse tuer, j'avais peur qu'il ne fasse quelque chose du stupide, j'avais peur qu'il voit une facette de moi qu'avec de la chance, il ignorait encore, et qu'il ne me regarde plus jamais de la même manière plus tard. Et pourtant. Pourtant si cela devait arriver, si je devais laisser sortir ce qu'il y a de pire en moi, je le ferai. Ce ne serait pas la première, ni la dernière fois. Mais ça le serait face à Requiem. Y'a pas à dire. Je devrais arrêter d'essayer de me montrer un peu romantique, non seulement c'est foireux mais en plus j'arrive à rendre ça dangereux !
Scrutant discrètement les moindres recoins, je distinguais enfin deux silhouettes élancée se dirigeant vers nous. Des petits rires suraiguës, une démarche pas très droite... deux jeunes femmes ivres. Si j'eus l'espace d'un instant la bêtise de me dire que ce n'était rien, cette pensée s'évanouit quasiment aussi vite qu'elle était venue. Ces deux jeunes femmes étaient des vampires. Et si j'en crois mon expérience d'il y a à peine une semaine, un vampire sous l'emprise d'une drogue ( ou dans le cas présent, d'un alcool ) est pire qu'un vampire dans son état normal.
- Bonsoir. Seriez vous perdus par le plus grand des hasards ?
- Bonsoir, non nous ne sommes pas perdus, passez votre chemin et allez désaouler ailleurs.
Je ne me souvenais pas d'avoir déjà entendu Requiem parler aussi sèchement, mais je dois bien avouer qu'il avait raison. Il était trop gentil, mais il avait raison. Là où j'étais un peu inquiète, c'était le fait qu'il était clair qu'aucune d'elle ne s'arrêterait là... Mais autant tenter le coup. Si ça m'évite de leur planter un pieu dans le coeur, ça sera pas plus mal ! Je tirais alors Requiem sur le côté afin de les contourner, gardant cependant tous mes sens en éveil. Si l'une d'elle osait esquisser ne serait-ce qu'un geste en notre direction... ça allait saigner. Sans doute pour moi. Mais aussi pour elles, faites moi confiance !